François Mauriac: l’éducation des filles

Mais je le répète, le plus redoutable pour elles, c’est cette opinion qu’on leur inculque, cet article de foi, que la nécessités où elle se trouvent et une victoire remportée sur le sexe fort.

Si pendant des siècles, la femme a subi la dure dont j’ai fait une peinture peut-être trop noire, c’est que, sans doute, c’était sa loi de préférer à tout l’attente anxieuse, la douleur, la mise au monde dans les larmes d’un petit enfant; qu’elle préférait à tout de lui donner la vie chaque jour, jusqu’à ce qu’il fût devenu un homme et encore au-delà, car nos mères nous portent jusqu’à leur mort, et quand elles nous ont quittés, à quelque âge que nous soyons, nous avons la sensation atroce que nous marchons seuls pour la première fois.

Aussi belle que puisse être la carrière d’une femme, il y aura toujours à la base une erreur, un manque.  Mettons à part l’enseignement et, sans distinction de religion et de castes, tout se  qui ressemble à une maternité spirituelle. Mettons à part l’état religieux, ou une jeune fille renonce à la maternité selon la chair, pour une maternité spirituelle; ou elle se fait la mère des enfants des autres, et de ces grands enfants malheureux que sont les malades; ou elle substitue aux angoisses de la mère de famille une immolation plus désintéressée, et dont le monde moderne ignore la valeur infinie.

Mais dans toute autre profession, aussi glorieusement que la femme occupe sa place, ce ne sera jamais tout à  fait sa place. Il y aura toujours un moment où elle aura l’air d’être ailleurs que là où elle devrait être.

Il n’y a pas d’uniforme possible pour les  femmes: la toge ne leur va pas plus que ne leur irait l’habit vert ou la tenue militaire. En dehors des vêtements de charité, en dehors de la blouse d’infirmière ou des saints habits des servantes de Dieu et des pauvres, la femme, sous un vêtement officiel, aura toujours l’air déguisée. Ca ne lui va pas, ça ne lui ira jamais.

N’empêche que les nécessités de la vie moderne la condamneront de plus en plus à ces déguisements.

N’empêche que les nécessités de la vie moderne la condamneront de plus  en plus à ces déguisements. De gré ou de force,  il faut que la femme se prépare à tenir une place qui ne lui était pas destinée. Mais je le répète, le plus redoutable pour elles, c’est cette opinion qu’on leur inculque, cet article de foi, que la nécessités où elle se trouvent et une victoire remportée sur le sexe fort. Tout se passe comme si, dans une nuit du 4 août *, les privilèges de mâles avaient été abolis et que les femmes eussent conquis le droit d’être considérées comme des hommes. Les hommes les ont   prises terriblement au mot. elles connaissent aujourd’hui les délices de l’égalité. Il est entendu qu’il n’y a plus de faiblesses dans la femme, plus même, grâce au sport, de faiblesse physique.

Un monde où l’égalité des chiens et des biches a été proclamée.

Elle a maintenant le privilège de demeurer debout dans les voitures publiques; on peut lui souffler la fumée d’un cigare dans la figure, lui demander de danser d’un clin d’oeil et d’un mouvement d’épaule. Mais, surtout, on peut l’attaquer de front,  même si elle est une jeune fille; on suppose qu’elle a de la défense; elle est libre d’accepter ou de refuser; elle sait ce qu’elle a à faire; aucun des deux partenaires n’engage plus que l’autre. Que l’éducateur pense bien à cela: ces enfants, ces petites filles, sont destinées à vivre dans un monde où, si elles ont le malheur de ne pas trouver un époux, qui les protège et qui les garde, leur faiblesse ne les défendra plus. Un monde où l’égalité des chiens et des biches a été proclamée.

*4 août 1989: abolition des privilèges de la noblesse et du clergé.


4 responses to “François Mauriac: l’éducation des filles

  • djibril

    je veut le plan detailler de cette oeuvre

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  • Mrs_A

    Plusieurs choses sont proprement révulsantes dans cette analyse : le fait que vous sous-entendiez que la maternité est la seule et unique chose que les femmes pourraient mener à bien, et le fait que vous affirmiez que les femmes ne sont que faiblesses et ne pourront jamais se protéger seules. Ces réflexions sont totalement aberrantes ! Renier comme vous le faites la  » nuit du 8 août  » ( et faire ceci, c’est faire un amalgame et un anachronisme honteux, puisque que la nuit du 8 août fut promulguée la libération des serfs, et non pas celle des femmes, et de plus, l’égalité acquise durement par les femmes, ce n’est pas celle de se hisser aux rang des hommes, c’est celle de mettre tout le monde sur un pied d’égalité, et donc désacraliser le phallocentrisme qui régnait jusqu’alors (et ça, ça n’a commencé qu’en 1944, et nous sommes encore malheureusement loin d’une relation parfaitement égale entre hommes et femmes ) confondre les deux relève de la bêtise pure et simple (ou de la recherche d’un effet de style pour relever le niveau miteux de cet article)) , c’est renier tous les combats durement menés pour que les femmes accèdent aux mêmes droits que les hommes, CE QUI EST PARFAITEMENT LÉGITIME. Prétendre que les femmes ne sont bonnes qu’à enfanter, à se faire protéger ou à prier une quelconque divinité, c’est se méprendre de façon tout-à-fait ignoble sur ce prétendu message. Dire comme vous le faite que gagner sa liberté, c’est avoir le droit de  » lui demander de danser d’un clin d’oeil  », c’est faire une erreur de la pire espèce entre liberté et prostitution. Dire que le ne pas trouver un époux est un malheur pour les femmes, qui ne peuvent alors pas se faire protégées, c’est réduire significativement le rôle des hommes à de simple bras-armés et celui des femmes à de simples vagins, présents sur Terre pour rien d’autre que se faire engrosser. C’est une atteinte des plus basses et des plus méprisables aux droits de l’Homme et de la Femme.
    Ce message m’a simplement donné envie de vomir tant son contenu est nauséeux.

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  • Kto

    Encore un texte écoeurant sans doute par des hommes frustrés de ne plus se faire servir leur boudin-purée le soir, combinée à une mentalité machiste à la française…il n’ y à qu’ à voir le nombre de reines en Angleterre, de Bodicea à la reine Victoria à la reine Élisabeth 1 er, qui furent aimées du peuple et parfaitement à leur place, merci bien…Dieu nous a faites pour apporter la Bonne parole, aider autrui tout comme les hommes, et de faire au mieux l’ occupation qu’ elles ont choisies elles…

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